L'héritage sombre de 33 marques connues
L'Histoire nous net en garde
Chaque jour, nos regards croisent ces logos familiers, ces emblèmes qui ornent nos vêtements, nos voitures, nos appareils. Nous les côtoyons avec une telle familiarité que nous en oublions parfois leur histoire originelle. En tant que designer graphique, je sais que derrière chaque courbe, chaque couleur, chaque image… se cache un récit. C'est la base même de ce que l'on nomme la "sémiologie" cette science séculaire dont les marques connaissent les moindres arcanes. Aujourd'hui, je vous invite à un voyage dans le temps, à la découverte d'une face cachée de ces symboles que nous pensons si bien connaître… Prenez un instant. Aujourd’hui, il est particulièrement pertinent de rappeler que certaines marques, si profondément ancrées dans notre quotidien, portent en elles les cicatrices d'un passé qu'il serait dangereux d'oublier.
Au sommaire :
33 entreprises et leur implication avec le régime nazi
Pourquoi est-ce Important aujourd'hui?
Un appel à la vigilance
Durant la Seconde Guerre mondiale, de nombreuses entreprises internationales se sont retrouvées impliquées avec le régime nazi. Si certaines ont subi des pressions, d'autres ont activement choisi cette collaboration, motivées par des intérêts économiques ou une adhésion idéologique.
Les entreprises en question ont contribué de diverses manières: fourniture d'équipements, production industrielle ou encore soutien logistique. Aujourd'hui encore, certaines des plus grandes entreprises mondiales portent malheureusement l'héritage lourd de cette époque. Voici une liste non exhaustive des plus connues.
33 entreprises et leur implication avec le régime nazi
Volkswagen
L'histoire de Volkswagen débute en 1937 sous l'impulsion directe d'Adolf Hitler, qui commande à Ferdinand Porsche la création d'une "voiture du peuple". Durant la guerre, l'usine de Wolfsburg se convertit à la production militaire pour la Wehrmacht. L'entreprise exploite plus de 20 000 travailleurs forcés, incluant des prisonniers de guerre et détenus des camps de concentration. En 1998, Volkswagen crée un fonds de compensation pour les anciens travailleurs forcés. L'héritage de cette période influence encore sa politique sociale aujourd'hui.
BMW, Volkswagen... Enquête sur le passé nazi des fleurons industriels allemands | L’EXPRESS
BMW (Bayerische Motoren Werke)
Durant la Seconde Guerre mondiale, BMW s'est profondément impliquée dans l'effort de guerre nazi. L'entreprise a massivement produit des moteurs d'avions pour la Luftwaffe, notamment pour les bombardiers. Pour maintenir sa production, BMW a exploité environ 30 000 travailleurs forcés, dont des prisonniers de guerre et des détenus des camps de concentration. L'usine d'Allach, près de Munich, était particulièrement connue pour ses conditions de travail inhumaines. Après la guerre, l'entreprise a dû faire face à son passé et a créé une fondation pour indemniser les anciens travailleurs forcés.
Renault
Sous l'Occupation allemande, Renault devient un acteur majeur de la collaboration industrielle française. L'entreprise, sous la direction de Louis Renault, met ses chaînes de production au service de l'effort de guerre allemand, fournissant véhicules et équipements militaires. Cette période controversée, marquée par des contrats lucratifs malgré les pressions exercées par l'occupant, se conclut par un tournant historique. En 1945, à la suite des accusations de collaboration portées contre Louis Renault, l'État français procède à la nationalisation de l'entreprise.
General Motors (Opel)
General Motors, via sa filiale Opel en Allemagne, s'est impliquée dans l'effort de guerre nazi en produisant des véhicules militaires et en exploitant le travail forcé. Malgré les sanctions internationales, l'entreprise a maintenu ses activités en Allemagne et a même reçu des dédommagements d'après-guerre pour ses usines endommagées.
Mercedes-Benz (Daimler-Benz)
Daimler-Benz a joué un rôle central dans la machine de guerre nazie. L'entreprise a produit des véhicules militaires, des moteurs d'avions et des chars. Wilhelm Kissel, alors PDG, était membre du "Cercle des amis du Reichsführer-SS" et entretenait des relations étroites avec le régime. L'entreprise a exploité plus de 40 000 travailleurs forcés, dont beaucoup provenaient des camps de concentration. Les conditions de travail étaient particulièrement brutales, avec de nombreux décès documentés. En 1944, près de la moitié de sa main-d'œuvre était composée de travailleurs forcés.
Porsche
Ferdinand Porsche, le fondateur, était personnellement impliqué avec le régime nazi et était membre du parti et des SS. Il a travaillé directement avec Hitler pour développer la Volkswagen Coccinelle, initialement appelée "KdF-Wagen". Plus crucial encore, Porsche a conçu plusieurs véhicules militaires, dont le char Tigre I, considéré comme l'un des plus puissants chars de la guerre. L'entreprise a également utilisé le travail forcé dans ses usines, notamment pour la production du char Ferdinand (plus tard renommé Elefant).
Ford
La filiale allemande de Ford a maintenu son activité pendant toute la guerre, produisant des véhicules militaires pour la Wehrmacht. Henry Ford lui-même était connu pour ses sympathies nazies et a reçu la Grand-Croix de l'Aigle allemand en 1938. Ford-Werke GmbH a utilisé massivement le travail forcé dans son usine de Cologne, employant plus de 5 000 travailleurs forcés. L'entreprise a continué à recevoir des bénéfices de sa filiale allemande pendant la guerre via des banques neutres en Suisse.
Continental
Continental était profondément impliquée dans l'effort de guerre nazi, produisant des pneus pour véhicules militaires et des masques à gaz. L'entreprise aurait exploité environ 10 000 travailleurs forcés dans ses usines, principalement à Hanovre. Elle a également participé à des expériences sur des prisonniers des camps de concentration pour tester la résistance de ses produits en caoutchouc. La direction de Continental était étroitement liée au parti nazi et a activement soutenu le régime.
En Allemagne, le groupe Continental lève le voile sur son passé nazi | Le Figaro
Lufthansa
La Deutsche Luft Hansa (ancien nom) était étroitement liée au régime nazi, servant d'outil de propagande et de transport. L'entreprise a maintenu des liaisons aériennes stratégiques pour le Reich et a participé à des missions militaires secrètes. Elle a également utilisé des travailleurs forcés pour l'entretien des avions et les opérations au sol. La compagnie a notamment transporté des officiels nazis et du matériel militaire, contribuant directement à l'effort de guerre.
L'aigle nazi continue de hanter la Lufthansa | Tribune de Genève
NASA
Après la guerre, via l'Opération Paperclip, la NASA a recruté plus de 1 600 scientifiques allemands, dont Wernher von Braun, principal architecte du programme V2 nazi. Von Braun, ancien membre des SS, est devenu le père du programme spatial américain, dirigeant le développement de la fusée Saturn V qui a permis les missions Apollo. Cette décision controversée illustre comment les États-Unis ont privilégié l'expertise technique sur les considérations éthiques dans la course à l'espace contre l'URSS.
Télévision. Quand la NASA chouchoutait ses nazis | Ouest France
Bayer
La question du lien entre Bayer (via IG Farben) et Josef Mengele, tristement célèbre pour ses expériences médicales à Auschwitz, a été soulevée par plusieurs historiens et journalistes, bien qu'il n'existe pas de preuve directe d'une collaboration personnelle entre Mengele et Bayer en tant qu'entité distincte. En tant que partie d'IG Farben, Bayer a participé à des expériences médicales mortelles dans les camps de concentration, notamment à Auschwitz. L'entreprise a testé des médicaments sur des prisonniers et participé à la production du Zyklon B, le gaz utilisé dans les chambres à gaz. Bayer a également exploité massivement le travail forcé. Après la guerre, IG Farben a été démantelée, mais Bayer a continué ses activités en tant qu'entreprise indépendante.
La saga de Bayer qui rachète Monsanto pour former un géant des pesticides | France Bleu
Merck
Pendant la guerre, Merck a activement collaboré avec le régime nazi, produisant des médicaments et des produits chimiques pour l'armée allemande. L'entreprise a participé à des expérimentations médicales sur des prisonniers et a utilisé le travail forcé dans ses installations. La famille Merck entretenait des liens étroits avec le parti nazi, et l'entreprise a bénéficié de contrats gouvernementaux lucratifs pendant cette période.
Deutsche Bank
La Deutsche Bank a joué un rôle central dans le financement du régime nazi, notamment en finançant la construction d'Auschwitz et d'autres camps. Elle a participé activement à l'"aryanisation" en facilitant la confiscation des biens juifs et leur transfert à des propriétaires "aryens". La banque a également financé des entreprises utilisant le travail forcé et a géré les comptes de la SS. Ses dirigeants étaient étroitement liés au parti nazi et ont facilité de nombreuses transactions financières pour le Reich.
La Deutsche Bank confesse ses liens passés avec le régime nazi | Le Monde
Allianz
L'assureur a activement collaboré avec le régime nazi, assurant les installations des camps de concentration et refusant systématiquement les réclamations des victimes juives. Kurt Schmitt, PDG d'Allianz, est devenu ministre de l'Économie sous Hitler. L'entreprise a participé à l'aryanisation en confisquant les polices d'assurance des Juifs et en les transférant au Reich. Allianz a également assuré les entreprises utilisant le travail forcé.
Swiss Bank Corporation
La banque a joué un rôle crucial dans la gestion des avoirs nazis, facilitant le transfert et le blanchiment d'or et d'autres biens volés aux victimes de l'Holocauste. Elle a maintenu des relations d'affaires avec le Reich tout au long de la guerre, profitant de la neutralité suisse. La banque a également aidé à dissimuler des fonds nazis et a refusé de restituer les comptes des victimes après la guerre.
Credit Suisse
Pendant la guerre, Credit Suisse a facilité de nombreuses transactions financières pour le régime nazi, profitant de la neutralité suisse. La banque a géré des comptes appartenant à des officiels nazis et a participé au commerce de l'or volé aux victimes de l'Holocauste. Elle a également aidé à blanchir des fonds nazis et a maintenu des relations d'affaires avec le Reich malgré les sanctions internationales.
Chase National Bank
La banque américaine Chase National Bank (aujourd'hui JPMorgan Chase) a été impliquée dans des transactions financières avec l'Allemagne nazie pendant la guerre. Elle a notamment gelé les comptes des clients juifs en France sous la pression du régime nazi et facilité des transferts de fonds pour le Reich.
Coco Chanel
Pendant l'Occupation, la relation de Gabrielle "Coco" Chanel avec le régime nazi reste complexe et controversée. Si elle a justifié son rapprochement avec certains cadres du parti nazi, notamment l'officier Hans Günther von Dincklage, par sa volonté de porter secours à son neveu prisonnier, ses actions démontrent une collaboration plus profonde. Son antisémitisme s'est particulièrement manifesté dans sa tentative d'exploiter les lois raciales pour reprendre le contrôle de Parfums Chanel à la famille juive Wertheimer. Elle a également servi d'agent pour les services de renseignement nazis sous le nom de code "Westminster". Après la Libération, elle a évité les poursuites grâce à des appuis influents et s'est exilée en Suisse avant de revenir relancer sa maison de couture en1954.
PARFUM DE TRAHISON - Quand Coco Chanel était un agent nazi | Le Monde
Coco Chanel, son passé nazi… Une part d’ombre toujours intacte | Radio J
SNCF
La Société Nationale des Chemins de fer Français a joué un rôle controversé pendant l'Occupation en transportant environ 76 000 Juifs et autres déportés vers les camps de concentration, principalement vers Auschwitz. Bien que sous contrôle allemand, la SNCF a fourni le personnel et le matériel roulant pour ces convois. L'entreprise a également participé au transport de milliers de jeunes Français réquisitionnés dans le cadre du Service du Travail Obligatoire (STO) vers les usines de guerre allemandes. Ces deux aspects illustrent le rôle logistique crucial de la SNCF dans l'effort de guerre nazi.
Guillaume Pepy reconnait le rôle de la SNCF dans la Shoah | Le Monde
Fanta
Pendant la guerre, l'embargo américain a empêché Coca-Cola d'importer son sirop en Allemagne. Max Keith, le directeur des opérations allemandes, a alors créé Fanta en 1940 avec des ingrédients disponibles localement pour maintenir l'activité pendant la guerre. La boisson était produite avec des sous-produits de l'industrie alimentaire comme du lactosérum et des pommes.
Le Fanta est-il une boisson créée par les nazis ? | Le Point
Est-il vrai que la boisson Fanta a été inventée sous Hitler ? | Ça m’intéresse
L'Oréal
Le fondateur de L'Oréal, Eugène Schueller a eu des liens étroits avec la Cagoule, un groupe d'extrême droite responsable d'assassinats politiques, et a soutenu le régime de Vichy. Sous l'Occupation, L'Oréal a quadruplé son chiffre d'affaires et a bénéficié de l'"aryanisation" en récupérant des biens juifs confisqués. André Bettencourt, futur administrateur de L'Oréal et gendre de Schueller, a écrit des articles antisémites dans un journal de propagande nazie avant de rejoindre stratégiquement la Résistance fin 1942. Après la guerre, grâce à leurs connexions notamment avec François Mitterrand, Schueller et Bettencourt ont évité l'épuration, et plusieurs anciens collaborateurs ont continué d'occuper des postes importants dans l'entreprise.
Barclays
La banque britannique Barclays a maintenu des opérations bancaires avec l'Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale. L'entreprise a facilité des transactions financières qui ont indirectement soutenu le régime nazi, notamment à travers sa filiale française. Après la guerre, comme de nombreuses autres institutions financières, Barclays a dû faire face à des enquêtes sur son rôle durant cette période. Cette collaboration illustre comment le secteur bancaire international s'est trouvé impliqué dans le financement du régime nazi, que ce soit par opportunisme économique ou sous la contrainte.
Siemens
L'implication de Siemens dans le régime nazi a été particulièrement significative. L'entreprise a non seulement participé à la construction d'équipements pour les camps de concentration, mais a également exploité le travail forcé. En tant que l'un des plus grands conglomérats industriels allemands de l'époque, Siemens a mis ses capacités de production au service du régime nazi, fournissant des équipements techniques et électriques essentiels. Aujourd'hui encore, cette entreprise, présente dans de nombreux foyers à travers ses produits électroménagers, porte l'héritage de cette période sombre de son histoire.
Hugo Boss
L'histoire de cette marque de mode est marquée par sa collaboration active avec le régime nazi. Une étude historique de Roman Köster révèle que l'entreprise a fourni des uniformes pour la Wehrmacht, les SS et les Jeunesses hitlériennes. Non seulement Hugo Boss a participé à l'effort de guerre, mais l'entreprise a également exploité environ 140 travailleurs forcés dans ses usines, une pratique répandue dans l'industrie allemande de l'époque.
Hugo Boss, couturier des Nazis | L'Histoire nous le dira # 84
Kodak
Pendant la Seconde Guerre mondiale, Kodak a maintenu des activités commerciales significatives en Allemagne nazie. L'entreprise a utilisé du travail forcé dans ses usines allemandes et a fourni du matériel photographique et des services au régime nazi. La filiale allemande de Kodak a notamment produit des équipements optiques et photographiques pour l'armée allemande. En outre, Kodak a continué à faire des affaires avec l'Allemagne même après l'entrée en guerre des États-Unis, via ses filiales en pays neutres. L'entreprise a également été accusée d'avoir discriminé ses employés juifs dans ses opérations européennes pendant cette période.
Nestlé
Durant la Seconde Guerre mondiale, Nestlé a entretenu des relations commerciales étroites avec l'Allemagne nazie. L'entreprise suisse a fourni du chocolat à la Wehrmacht et a racheté une entreprise allemande, Sarotti, qui utilisait le travail forcé. Nestlé a également maintenu des relations commerciales avec le régime nazi via sa filiale allemande, profitant économiquement de la situation. L'entreprise a notamment fourni du lait condensé et d'autres produits alimentaires à l'armée allemande. Après la guerre, Nestlé a fait l'objet de critiques pour avoir collaboré avec le régime nazi et pour avoir potentiellement bénéficié d'actifs "aryanisés".
Quand Nestlé demandait à ses cadres un « certificat d'aryanité »...| Le Monde
Adidas/Puma
Ces deux marques emblématiques du sport partagent une histoire commune complexe avec le régime nazi. Les frères Adolf (Adi) et Rudolf Dassler, fondateurs respectifs d'Adidas et Puma, étaient tous deux membres du parti nazi. Leur entreprise familiale initiale, la "Gebrüder Dassler Schuhfabrik", a joué un rôle notable lors des Jeux olympiques de Berlin en 1936 en fournissant des chaussures à plusieurs athlètes, ce qui leur a permis de bénéficier des politiques favorisant les entreprises alignées avec le régime. L'entreprise a ensuite contribué à l'effort de guerre en produisant de l'équipement militaire pour le régime. Après la guerre, les frères se sont séparés, créant deux entreprises distinctes: Adidas (Adolf Dassler) et Puma (Rudolf Dassler). Cette période sombre de leur histoire illustre comment même les marques les plus populaires d'aujourd'hui ont été impliquées dans le régime nazi, que ce soit par conviction idéologique ou par opportunisme économique.
Les racines nazies d'Adidas par Kayla Greenfeld | Jewish Virtual Library
C&A
La célèbre chaîne de magasins de vêtements C&A a été directement impliquée dans l'exploitation de travailleurs forcés pendant la Seconde Guerre mondiale. L'entreprise, fondée par les frères Clemens et August Brenninkmeijer (d'où le nom C&A), a utilisé cette main-d'œuvre forcée dans ses opérations pendant la période nazie. Cette pratique s'inscrivait dans le cadre plus large de l'exploitation systématique de travailleurs forcés par les entreprises allemandes durant cette période. Après la guerre, comme beaucoup d'autres entreprises, C&A a dû faire face à son passé et reconnaître son implication dans ces pratiques moralement condamnables.
Le propriétaire de C&A choqué par l’histoire de sa famille liée aux nazis | The Times of Israël
Louis Vuitton
L'implication de Louis Vuitton pendant le régime de Vichy est particulièrement notable. La maison de luxe occupait une position privilégiée unique, étant la seule entreprise autorisée à maintenir sa présence dans le Grand Hôtel du Parc et Majestic, à Vichy, qui servait de siège au gouvernement de Pétain. Henry Vuitton, qui dirigeait alors la maison avec son frère Gaston, a reçu une décoration des nazis en reconnaissance de sa loyauté envers le régime. Leur collaboration s'est manifestée notamment par la création d'une usine spécialement dédiée à la fabrication de bustes du maréchal Pétain. Cette période de l'histoire de l'entreprise illustre comment même les maisons de luxe les plus prestigieuses ont pu être impliquées dans la collaboration avec le régime nazi.
Lacoste
La marque au crocodile a joué un rôle actif pendant l'occupation en fournissant des uniformes et en apportant son soutien au régime nazi. Cette collaboration s'inscrivait dans le contexte plus large des entreprises françaises qui ont choisi de travailler avec l'occupant. La production d'uniformes représentait une contribution directe à l'effort de guerre allemand, permettant à l'entreprise de maintenir ses activités pendant cette période trouble. Cette partie de l'histoire de Lacoste illustre la complexité des choix auxquels les entreprises françaises ont été confrontées pendant l'occupation.
IBM
L'implication d'IBM dans le régime nazi est particulièrement notable par sa fourniture de systèmes de recensement qui ont été utilisés dans les camps. Ces systèmes, basés sur la technologie des cartes perforées, ont permis aux nazis d'organiser et de gérer efficacement leurs opérations de persécution. IBM, à travers sa filiale allemande Dehomag, a fourni non seulement la technologie mais aussi l'expertise technique nécessaire à son utilisation. Cette collaboration technologique a significativement augmenté l'efficacité administrative du régime nazi dans la mise en œuvre de ses politiques génocidaires.
Coca-cola, IBM, Ford: collabos des Nazis | L'Histoire nous le dira
IBM et l'holocauste | Edwin Black
IKEA
Ingvar Kamprad, fondateur d'IKEA, a eu des liens plus étroits avec les mouvements nazis que ce qu'il avait initialement admis. Il était membre du Rassemblement socialiste suédois (SSS), un groupuscule extrémiste, et la police de sécurité suédoise (Saepo) avait ouvert un dossier "nazi" sur lui en 1943, l'année même de la fondation d'IKEA. Kamprad est resté un admirateur de Per Engdahl, une figure majeure du nazisme suédois, même après la guerre, allant jusqu'à l'inviter à son mariage en 1950. Bien qu'il ait qualifié plus tard cet engagement de "plus grave erreur" de sa vie et de "folie de jeunesse", une enquête de la journaliste Elisabeth Aasbrink révèle qu'il maintenait encore son admiration pour Engdahl des années plus tard. IKEA a tenté de distancer l'entreprise de ce passé en affirmant que ces événements n'avaient "rien à voir avec les activités d'IKEA".
La face cachée d’IKEA | Hardisk
Le fondateur d’Ikea voit son passé nazi ressortir de nouveau | Le Nouvel Obs avec AFP
MAUVAISES FRÉQUENTATIONS - Le fondateur d’Ikea, plus nazi que prévu ? | Le Monde
Disney
L'histoire de Disney pendant la Seconde Guerre mondiale est particulièrement complexe et ambivalente. D'un côté, Walt Disney, connu pour son conservatisme, a entretenu des relations ambiguës avec l'Allemagne nazie jusqu'en 1941. De l'autre, le studio s'est activement engagé contre le nazisme en produisant des films de propagande anti-nazie, notamment avec le célèbre court-métrage "Der Fuehrer's Face" où Donald Duck parodie Hitler. Paradoxalement, Hitler était un grand admirateur des productions Disney, particulièrement Blanche Neige et Pinocchio. Cette dualité illustre la complexité des relations entre l'art, la propagande et la politique pendant cette période, le studio ayant finalement choisi clairement son camp en soutenant l'effort de guerre américain.
Disney, un rapport opportuniste à la politique | Journal l’Humanité
Pourquoi est-ce important aujourd'hui?
En tant que designers graphiques, nous façonnons l'image des marques. Cette responsabilité nous invite à étudier leur histoire tout en reconnaissant leur capacité d'évolution. Si le passé ne doit pas être oublié, il ne doit pas non plus devenir une prison: les entreprises d'aujourd'hui, leurs équipes et leurs valeurs peuvent être très différentes de celles d'hier. Notre rôle est de comprendre cette histoire pour mieux nous positionner, tout en permettant aux marques de se réinventer de manière éthique. Cela nous amène à nous poser des questions:
Quelle est notre responsabilité en tant que consommateurs informés?
Comment le succès économique actuel de ces entreprises, bâti en partie sur un passé moralement condamnable, remet-il en question notre vision de la méritocratie et de la "réussite méritée"?
Comment s'assurer que la course au profit ne prime pas sur les droits humains?
Comment rester vigilants face aux dérives potentielles des entreprises aujourd'hui?
Comment les entreprises peuvent-elles reconnaître leur passé tout en évoluant positivement?
Dans quelle mesure les structures économiques actuelles peuvent-elles favoriser des comportements contraires à l'éthique?
Quel rôle les designers peuvent-ils jouer dans la promotion d'une communication transparente sur l'histoire des entreprises?
Quelle est la responsabilité des écoles de commerce et de design dans l'enseignement de cette histoire?
Quel rôle peuvent jouer les médias dans la préservation de cette mémoire collective?
Un appel à la vigilance
Cette page sombre de l'histoire nous rappelle l'importance de la vigilance et de la connaissance pour éviter de répéter les erreurs du passé. En tant que professionnels créatifs et citoyens, nous devons comprendre comment les plus grandes entreprises peuvent être complices d'atrocités lorsque l'éthique est sacrifiée au profit.
La distinction entre Histoire et Mémoire est fondamentale : l'Histoire analyse objectivement les faits, tandis que la Mémoire façonne notre perception du présent à travers le prisme des émotions et des constructions sociales. Cette compréhension nous permet de mieux appréhender les enjeux actuels, notamment face aux tensions sociopolitiques et aux positionnements controversés de certaines entreprises.
Cette leçon résonne particulièrement aujourd'hui, alors que nous observons certaines grandes entreprises s'aligner avec des mouvements politiques extrémistes, comme le soutien de certaines marques à des figures controversées telles que Trump ou Musk. Face à la montée inquiétante des mouvements néo-fascistes en Europe, aux États-Unis et en Amérique latine, il est plus crucial que jamais de:
Rester informés et critiques face aux pratiques des entreprises.
Soutenir les entreprises qui prennent position contre toute forme de discrimination.
Encourager la transparence sur leur histoire et leurs actions actuelles.
Google (My Business) a refusé la publication de cet article, pourtant factuel, documenté et respectueux. Le voir bloqué par un géant du numérique me semble très grave (mais pas si étonnant). À quel moment un discours antinazi devient-il "non conforme" aux règles d’une plateforme? Que dit cette censure sur la manière dont le débat public est aujourd’hui filtré, même lorsqu’il est salutaire et argumenté?
Je tiens à remercier chaleureusement mes relecteurs pour leur aide précieuse dans la vérification de cet article. Je ne voulais surtout pas propager de fausses informations, particulièrement sur ce sujet aussi délicat.
Merci à :
Sylvain Chardonnet | Chercheur en histoire de la diaspora arménienne & Bibliothécaire universitaire
Johan PICOT | Historien consultant, Docteur en Histoire, Historien chez Michelin et Directeur d'édition à l’Academie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Clermont-Ferrand
Léa Curveur | Co-créatrice du Podcast Paroles de Patrimoines - Vice présidente de l’Association L’EPICentre du patrimoine Clermont-Ferrand
Laurie Madiot | Spécialiste en référencement - Docteur en égyptologie
N'hésitez pas à partager vos remarques dans les commentaires, en citant vos sources et éventuellement votre métier - votre contribution est la bienvenue!
Sources:
« Nazi Billionaires » : ces entreprises qui ont tiré profit du Troisième Reich | Le Nouvel Obs
10 grandes entreprises de pays alliés ayant collaboré avec les nazisSource | Le Blog du Québec
Outre-Rhin, deux marques rattrapées par leur passé nazi | Le Monde
Ces marques ont collaboré avec le III Reich | La vrai histoire
Allemagne : de grands groupes reviennent sur leur passé avec les nazis | Le Point
La Banque centrale suisse admet avoir acheté de l'or volé par les nazis | Le Monde
En vidéo – L’histoire de l’argent nazi caché dans les banques suisses | Le Temps
Cet article vous a plu? Partagez-le en masse!
Vous avez d’autre questions?
Peut-être que ces articles vous aideront a y répondre.
Hello, moi c’est Sarah
Je suis designer graphique depuis 2011 et me spécialise dans la création d’identité visuelle, la création de logo et l’illustration dédiée aux petites et moyennes entreprises.